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Il y avait sans doute trop longtemps que Louis-Marie
n'avait pas eu d'ennuis. Sa vie devait être
marquée perpétuellement par la "Croix".
Comme il le dit un jour lui-même :
« Pas de croix ? Quelle croix ! »
Aussi, des difficultés s'élèvent-elles
bientôt à son sujet dans le petit groupe
des missionnaires : on lui reproche son originalité.
Sans pouvoir le dire, on lui reproche sans doute plus
encore son succès auprès des foules,
succès qui laisse les autres missionnaires
un peu dans l'ombre
un peu jaloux peut-être
? |
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Il lui faut donc reprendre sa route, solitaire, en
tant que prêtre. Il a toujours le fidèle
Frère Mathurin, et même un nouveau venu,
Frère Jean.
Les voilà installés, tous trois, dans
un petit ermitage qui domine la ville de Montfort-sur-Meu.
Ils l'habiteront deux ans, rayonnant de là
sur les pays alentour, restaureront la chapelle Saint-Roch,
et bâtiront un calvaire.
Entre deux missions, les trois compagnons reviendront
avec bonheur à leur cher ermitage Saint-Lazare,
pour s'y retremper dans le silence de la retraite.
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Dans la petite chapelle, ils ont installé,
devant l'autel de Notre-Dame, un chapelet monumental
dont les grains « de la grosseur d'une noix
» permettent à plusieurs personnes de
le réciter en même temps.
Il n'y a cependant pas tous les jours à manger
dans la petite communauté. Un certain jour,
les deux bons Frères sont un peu tristes :
c'est qu'ils n'ont pas déjeuné !
Et
le soir est là bientôt, qui promet semblable
souper.
« Confiance, confiance ! » répète
le Père, qui a une foi inébranlable
en la Providence.
Il a bien raison, car avant l'heure de se mettre à
table, voici qu'arrive un paysan des environs, à
qui il est venu soudain l'idée de porter tout
de suite un panier de provisions à l'ermitage
Saint-Lazare.
Joie et reconnaissance dilatent le cur des trois
compagnons.
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Le Père ne redoutant jamais rien pour lui,
il faut bien, en effet, que la Providence le protège
elle-même. Passant dans une rue, il entend des
cris sortant d'une maison : c'est un homme qui bat
durement sa femme. Montfort se précipite entre
eux. Furieux, l'homme brandit sa hache contre Louis-Marie.
Hurlement de terreur de la femme. Mais la hache ne
retombe pas. Stupide, le bras raidi en l'air par une
force mystérieuse, le forcené ne peut
qu'injurier Louis-Marie.
Dieu a retenu le bras criminel. |
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Sa famille étant revenue au pays, Louis-Marie
accepte d'y déjeuner, mais à condition
qu'on fasse un grand repas où il puisse amener
ses "amis".
on prépare donc une longue table, et on l'attend,
un peu intrigué.
A l'heure dite, Montfort arrive, entouré
d'un groupe de pauvres, de boiteux, d'aveugles,
miséreux de tout genre. Heureusement, Monsieur
et Madame Grignion ont le cur vraiment chrétien
; aussi tout le monde entoure les malheureux et
leur fait fête. les parents de Louis-Marie
doivent être fiers de la charité de
leur fils.
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il faut pourtant bientôt quitter la région,
et c'est vers Nantes que se dirigent maintenant
Montfort et ses deux compagnons.
Sur la place Royale de cette ville, un groupe d'officiers
discutent. Et l'un d'eux se met à jurer.
Montfort ne peut supporter cela. Il s'adresse aussitôt
à lui en termes à la fois si délicats
et si fermes que l'officier, touché par la
grâce, se met à genoux devant tous
et demande pardon de son blasphème.
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Les prédications reprennent. Pour y appeler
les fidèles, Frère Mathurin s'en va
vers le soir, à travers les vignes, agitant
une clochette et chantant à pleine voix :
« Alerte ! La mission est ouverte,
venez-y tous, mes bons amis, venez gagner le Paradis
! »
les gens accourent, et la puissante parole du Père
les tient bientôt sous le charme. Partout,
succès semblable. Partout, des prodiges éclatent,
et sa réputation de sainteté grandit
sans cesse. On se raconte de bouche à oreille,
l'histoire de ce champ stérile, devenu une
bonne terre après qu'il y eut prié.
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On cite aussi, en tremblant, cet homme frappé
par la foudre dans sa maison, alors qu'il avait
refusé, seul de tout le village, de venir
à la mission.
Certains ont surpris le Père en conversation
« avec une dame rayonnante de Lumière
». La sainte Vierge en effet, cette «
bonne Mère » qu'il aimait tant lui
apparaissait ou s'entretenait avec lui.
Telle chrétienne qui avait dissimulé
trois fautes en confession se voit commander, comme
pénitence, de laver un mouchoir blanc qui
porte trois taches.
Surprise
de ne pas réussir à faire partir les
taches, elle comprend soudain, et revenant au confessionnal,
avoue les trois péchés cachés.
Les taches disparaissent ensuite facilement.
Voilà Montfort pris un jour à partie
par quelques débauchés qui se sont
jurés de le tuer. Ils l'attendent un soir,
à un carrefour, et se jettent sur lui. Des
personnes accourent, heureusement, armées
de bâtons, et le délivrent.
Mais comme elles veulent ensuite châtier les
jeunes bandits :
« Mes chers enfants, » supplie
Louis-Marie, « ne leur faites pas de mal,
ils sont plus à plaindre que vous et moi.
»
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Les châtelains de La Chevrolière demandent
au Père une mission. Mais ils sont en opposition
avec le Curé de la paroisse, ce qui crée
à Louis-Marie de grosses difficultés
: là où règne la division,
c'est souvent le diable qui mène le jeu.
Montfort prêche donc un jour, dans cette paroisse,
lorsque le Curé se met à le critiquer
tout haut.
Il
s'oublie jusqu'à dire aux assistants qu'ils
perdent leur temps en venant aux exercices de la
mission. Comme à Poitiers, Louis-Marie s'est
mis à genoux. Puis il descend de la chaire,
salue respectueusement Monsieur le Curé et
fait chanter le Te Deum devant le Saint-Sacrement,
assurant à l'un de ses amis qu'il a de cette
humiliation « une joie qui ne saurait exprimer
».
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Le Frère Pierre, un nouveau venu dans la
petite troupe, tombe malade à Vertou, pendant
la mission. C'est grave. On lui donne l'extrême-onction.
Après lui avoir demandé s'il a la
foi, le bon Père lui dit :
« Pierre, voulez-vous m'obéir
?
« De tout cur ! »
« Je vous demande de vous lever dans
une heure, et de venir nous servir à table.
»
Quand les missionnaires, après la cérémonie,
viennent déjeuner, ils trouvent, debout,
tout souriant, celui qui était mourant le
matin.
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Montfort
est de plus en plus connu et, naturellement, aimé
et vénéré par les uns, critiqué
et calomnié par les autres.
Une dame charitable de Nantes lui donne une petite
maison, qu'il appelle aussitôt une «
Providence ». Il l'habite avec ses Frères
lorsqu'il est de passage dans la ville. Mais sa
vie est de missionner sans cesse : le voilà
à Bouguenais. Il est en chaire, tenant comme
d'habitude tout l'auditoire en haleine. Soudain,
il s'arrête net, et, d'un tout autre ton s'écrie
:
« Deux hommes pour aller sauver mon
âne qui se noie au bas du bourg ! »
Plusieurs hommes
se précipitent et parviennent, non sans peine,
à remonter le baudet tombé à
l'eau.
La foule, dans l'ébahissement de dons si
particuliers, faits par Dieu à Louis-Marie,
n'en écoute que plus attentivement ses conseils.
Beaucoup se convertissent. Tous le vénèrent
comme un saint que Dieu aime et éclaire d'une
manière vraiment visible, même sur
des choses aussi secondaires que cette chute de
l'âne dont Montfort, en chaire, avait eu soudain
connaissance en son esprit.
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